Le projet fou d'Auguste Comte ou la tentation de l'objectivisme
Auguste Comte est connu comme l'inspirateur du "positivisme", mais bien peu savent qu'il a été le chantre et l'instigateur d'une nouvelle religion de l'"Humanité", sorte de succédané du culte rendu à l'"Etre suprême" par Robespierre (entendu comme une sorte de religion sans "dieu-autre" qui relie de façon "horizontale" et fraternelle tous les êtres).
Dans cette religion "scientifique" universelle sensée dépasser les particularismes et les fétichismes culturels. A. Comte entend faire converger l'humanité dans un amour conjoint et une sympathie mutuelle avec "l'ordre pour base, l'amour pour principe et le progrès comme but".
Si cette vision consistant à imaginer un Coeur universel ou tous les êtres sont reliés mutuellement de façon immanente sous l'auspice du progrès et de la vérité est magnifique et belle, vouloir l'objectiver est source de désastre. C'est me semble t il l'origine du mal, du sectarisme et des catastrophes qu'on impute habituellement et de façon vague à "la religion".
Or il s'agit surtout sous ce vocable d'imposer une vision subjective et personnelle à tous plutôt que laisser s'exprimer l'unicité et la singularité de chacun. A. Comte a eu une vision personnelle suite à la mort de Clothilde de Vaux un peu comme Novalis qui a du faire face à la disparition tragique et prématurée de Sophie.
Mais le poète Hölderlin a montré dans son exposé sur l'essence de la poésie que seule la "sensation transcendante" basée sur l'écho imaginatif engendré par le sensible et la nostalgie était capable de nous projeter vers un futur personnel en lequel le fleuve rejoint la vaste mer par l'étroit passage de l'estuaire.
Qu'il agisse des rives de l'Ister, du Rhin ou de la Garonne, c'est la vision de la mer unique à chacun qui donne sens au cours d'eau naissant passant par son estuaire propre.